Actualités

Le mythe des millésimes en 5 à Bordeaux
novembre 2025

De quoi s’agit il ?

On peut fréquemment lire et entendre que les millésimes bordelais finissant par le chiffre 5 sont dotés d’une excellente qualité. Cette affirmation est elle justifiée ou non et si telle est le cas comment peut on tenter de l’expliquer.

Commençons par un rapide tour d’horizons des caractères généraux des millésimes concernés depuis 1975 sur le département de la gironde ainsi que des conditions climatiques de ces mêmes années.

 

1975 

Excellent millésime. Récolte peu importante, les baies sont restées petites.

Vins rouges : complets et corsés, toutes les qualités de très grands vins qui n’ont pas toujours tenu leur promesse. Vins de longue garde.

Vins blancs : bouquet très riche, typé, puissant, excellent goût de fruits rôtis : un grand vin de soleil.

Vins liquoreux : conditions difficiles pour le botrytis avec une humidité insuffisante et le froid d’octobre.

Conditions climatiques : mois de juillet à septembre chauds.

 

1985

Excellent millésime malgré un rendement élevé. 

Vins rouges : équilibrés et tanniques, riches en couleur ; arômes de fruits murs. Mieux réussis à Pomerol et Saint-Emilion grâce au Merlot. Bonne évolution. Vin de garde.

Vins blancs : les secs sont très réussis, ronds, amples, arômes puissants.

Conditions climatiques : été exceptionnellement long, chaud et sec jusqu’à la fin du mois d’octobre.

 

1995

Grande année, récolte abondante. 

Vins rouges.  D’une manière générale les vins rouges sont réussis : ceux à dominante de Merlot sont très ronds, très soyeux ; les Cabernets se présentent avec une grande expression aromatique. Par leur structure, leur équilibre et leur harmonie, ce seront d’excellents vins de garde.

Vins blancs : de grande qualité.

Vins liquoreux : vins concentrés à souhait qui font de très grandes bouteilles à conserver.

Conditions climatiques : printemps et été précoces. Vague de chaleur et de sécheresse. Pluies salutaires et fraîcheur en septembre.

 

2005

Millésime reconnue unanimement comme exceptionnel.

Vins rouges : puissants, équilibrés et structurés. Grande concentration mais aussi fraîcheur remarquable grâce à une acidité naturelle bien préservée. Long potentiel de garde.

Vins blancs : très belle réussite, bien que l’année chaude ait donné des vins moins vifs que les 2004 ou 2007.

Vins liquoreux : millésime de rêve grâce à l’alternance d’humidité matinale et d’après-midi ensoleillés.

Conditions climatiques idéales : été chaud et sec, quelques pluies en septembre/octobre, maturité phénolique complète.

 

2015

Millésime considéré comme excellent, parfois remarquable surtout à Saint-Emilion, Pomerol et Pessac-Léognan rouges. Equilibre entre maturité et fraîcheur offrant des vins chaleureux et charmeurs.

Vins rouges : élégants, sur le fruit, tanins soyeux, expressifs.

Vins blancs : conditions climatiques un peu chaudes qui ont donné des vins plus amples que vifs. Bon mais pas un millésime de référence pour les blancs secs.

Conditions climatiques : été chaud avec quelques périodes caniculaires, mais des nuits fraîches préservant la fraîcheur aromatique. Pluies bienvenues en septembre pour atteindre une maturité phénolique complète. 

 

Depuis le millésime 1975, il semble bien que le mythe soit largement fondé. Je dis bien depuis 1975 car le millésime 1965 était tout à fait médiocre !

On remarque que ces différentes années ont bénéficié de conditions climatiques chaudes et sèches avec des pluies souvent salutaires en fin d’été.

 

Pourquoi ces conditions sont elles particulièrement favorables à l’élaboration de grands vins ? Plusieurs raisons :

- Une maturité phénolique optimale : Les tannins sont plus murs, plus souples et donnent des vins plus ronds et charmeurs. Les arômes sont plus intenses.

- Richesse en sucre : la chaleur augmente la photosynthèse donc la production de sucre dans le vin. Degrés d’alcool plus élevé et corps plus ample.

- Concentration et équilibre : baies plus petites entrainant un rapport peau/jus plus élevé, plus de couleur, tanins, arômes. Bonne acidité si les nuits sont fraîches ce qui préserve l’équilibre du vin.

- Peu de maladies cryptogamiques donc moins de traitement pour une vendange plus seine.

 

Mais attention, toutes les années chaudes ne font pas automatiquement de grands vins. En 2003 par exemple, la canicule a entrainé une perte d’acidité pour créer des vins lourds. Le stress hydrique trop important peut également bloquer la maturation. Tout cela est une question d’équilibre subtil entre chaleur, nuits fraîches, et bonne réserve d’eau. Bref un équilibre rare !

 

Espérons que le millésime 2025 qui grandit en ce moments dans les caves de Bordeaux puisse ne pas faire mentir cette belle série des millésimes en 5. Il semble pour l’instant tout à fait prometteur, après les premières dégustations. Espérons pour Bordeaux qu’il en soit ainsi !

 

En résumé on peut dire « quand le millésime finit par 5, il y a de quoi se réjouir …sauf quand la météo décide du contraire ! »

 

Pages